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Le parcours extraordinaire d’un grand chef étoilé – Franco Bowanee


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De l’Ile Maurice à l’Yonne, en passant par Washington, le grand écart payant du chef étoilé Franco Bowanee

Loin des grands héritiers de lignées de restaurateurs que l’on connaît, Franco Bowanee a construit sa propre identité au fil de ses voyages et veille à conserver son accent mauricien qui vient persiller chacun de ses plats. C’est dans l’Yonne qu’il met son talent au service de sa cuisine, pour laquelle il a obtenu une étoile au guide Michelin, en 2019.

Notre estomac curieux avait laissé de la place « au cas où » et ne s’était pas trompé. L’hôte d’un jour, le chef étoilé icaunais Franco Bowanee nous accueille dans son antre au château de Vault-de-Lugny et dépose, sur la table, café et cake à l’orange qui a ce petit goût de « reviens-y ». 

Un an plus tôt, le chef d’origine mauricienne gagnait sa première étoile Michelin, qu’il aborde depuis fièrement sur son tablier blanc : « x Michelin 2019 », dessiné au fil rouge. Le fruit de plusieurs années de persévérance, de rigueur et de voyages, de son île à Washington et de Washington à Vault-de-Lugny, village de quelque 300 âmes au cœur de l’Yonne. Le grand écart.

 

Fils d’une couturière et d’un vendeur de montres, rien ne destinait le jeune Franco aux fourneaux. À la fin de sa scolarité – car il fallait bien faire quelque chose – le voilà parti à l’école hôtelière pour deux ans. Il est embauché au Labourdonnais, hôtel cinq étoiles où l’élève se révèle de son aveu « appliqué, plutôt que doué ».

« Je me faisais crier dessus. Les cuisines, c’est un cadre un peu militaire. Il faut respecter les heures, etc. Après mes deux premières années, ça allait mieux et j’ai commencé à prendre du plaisir. »

Franco Bowanee

Au sein d’une grande brigade d’une quarantaine de cuisiniers, où les casseroles s’entrechoquent dans un capharnaüm, entre coups de feu et coups de stress, la vie de l’apprenti cuisinier ne démarrait pas sous les meilleurs auspices. Franco Bowanee laisse filer un sourire. « Je me faisais crier dessus. Les cuisines, c’est un cadre un peu militaire. Il faut respecter les heures, etc. Après mes deux premières années, ça allait mieux et j’ai commencé à prendre du plaisir. » 

Un mentor « rude »

C’est là que le cuistot rencontre son mentor, un certain Nizam Peero, « le meilleur chef de Maurice et de l’Océan Indien, estime son disciple. C’est lui qui m’a mis le pied à l’étrier. Encore aujourd’hui, il reste mon mentor. » Un chef « rude » plutôt que despotique. « On apprenait à la dure, confie Franco Bowanee. C’était la vieille école. Soit on tenait le coup, soit on changeait de métier. À la fin, ceux qui restaient étaient ceux qui voulaient vraiment réussir dans la cuisine. »

Obéissant quand il le devait, rigoureux quand il le fallait, le jeune Franco est rapidement pris sous l’aile du chef qui lui confie des tâches, moins ingrates que celles qu’on s’imagine pour un jeune cuisinier, d’autant plus au sein d’un restaurant prestigieux.

Direction Washington, à côté de la Maison Blanche

Franco Bowanee se voit ainsi confier l’écriture des menus dégustation à réaliser de A à Z, mise en bouche au dessert. Franco fait les recettes, le chef les valide. « J’ai pu m’occuper de pas mal de menus. Je ne pouvais pas faire ça tout seul, donc je passais de poste en poste pour donner mes directives et je vérifiais les préparations. J’étais curieux de tout et j’adorais ça. » 

En bon chef d’orchestre, poste qui lui sied à ravir, Franco Bowanee saisit, à l’hôtel Willard à Washington (à côté de la Maison blanche), une opportunité de carrière avec sa compagne qu’il avait rencontrée dans les cuisines mauriciennes.

« J’étais un peu largué »

Les débuts, là encore, s’avèrent laborieux : « J’étais un peu largué, avoue le Mauricien. Il y avait déjà la barrière de la langue et une culture culinaire complètement différente ».

 

D’une cuisine légère à une autre plus riche où beurre et crème remplacent la traditionnelle huile qui venait agrémenter les plats mauriciens. D’une cuisine exclusivement d’été à une autre construite autour des quatre saisons [Il n’y a que deux saisons à l’Île Maurice, l’été et l’hiver, où les températures descendent seulement à 11 degrés, Ndlr]. D’une cuisine métissée, savant mélange des saveurs indiennes, chinoises et françaises, à une autre plus traditionnelle…

Après « deux fabuleuses années » aux États-Unis, le chef revient sur son île Maurice et caresse l’espoir de trouver un vol aller sans retour, direction Dubaï ou l’Australie, dans les cuisines de grands restaurants. « À l’époque, Dubaï et l’Australie étaient les destinations en vogue, où on construisait de grands hôtels un peu partout… Ça me plaisait. Et puis je suis revenu avec mon mentor qui m’a dit “T’inquiète pas, tu restes le temps que tu veux avec nous. Et quand tu trouves une opportunité, tu pars?!” »

Loin des strass et paillettes qu’une vie aux Émirats lui promettait – « J’ai eu la chance de ne pas y aller. Je n’aurais pas eu la même carrière?! », glisse-t-il -, c’est par le fruit d’un heureux hasard que Franco Bowanee prend les commandes d’un restaurant icaunais.

 

Un soir de décembre 2007, son chef le laisse aux manettes d’un menu dégustation pour deux personnes. « C’était les propriétaires du château de Vault-de-Lugny. Ils ont adoré le repas – “de mémoire, un foie gras en torchon avec une compoté d’ananas, un vieille rouge (poisson typique de l’Ile Maurice), un agneau et un dessert chocolat mangue” – et le lendemain, ils ont demandé à me voir pour me proposer de travailler chez eux », se souvient Franco Bowanee, qui débarque, trois mois plus tard, en France. 

D’une cuisine bourguignonne, à une autre plus raffinée

D’une brigade de 40 cuisiniers, le Mauricien arrive dans une belle tambouille, aux côtés de sa femme et deux autres cuisiniers. « Mais ici, au moins, on fait tout. Je ne suis pas comme mes anciens chefs. J’aime que tout se passe dans le calme, chacun sait ce qu’il a à faire », rassure le chef d’orchestre, qui modifie petit à petit la carte bourguignonne en une autre plus raffinée sur laquelle se trouve un plat signature, que seuls les amoureux de littérature connaissent…  

Dans son roman La Carte et le Territoire, Prix Goncourt 2010, Michel Houellebecq citait un « homard pressé » dégusté au château de Vault-de-Lugny, qui n’avait pourtant jamais été servi en ces lieux… « Nous avons créé le plat pour lui et l’avons invité pour qu’il nous donne son avis. Il a adoré et nous l’avons mis à la carte?! »
Un plat comme tant d’autres, sorte de valse de saveurs, dans lequel Franco Bowanee veille toujours à ramener un bout de l’Île Maurice : « C’est notre identité ».

 

En fin d’année 2018, le chef reçoit la visite du guide Michelin. « Il a dîné, est monté dans sa chambre et le lendemain m’a fait appeler », se souvient-il. L’année suivante, Franco Bowanee gagnait sa première étoile. « Quand j’ai appris que j’avais mon étoile, j’étais à l’Île Maurice et je devais rentrer en France pour la cérémonie. On avait interdiction d’en parler. Je ne voulais même pas le dire à mes parents, tout Maurice aurait été au courant?! », se marre Franco Bowanee, qui s’est donné comme objectif une deuxième étoile cousue sur son tablier, d’ici 2024.

Récit: Tiphaine Sirieix

Source : https://www.lamontagne.fr

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